jeudi 15 novembre 2007

Rappel: l’Etat de Palestine attend son tour…

George W. Bush réunit le 26 novembre, à Annapolis, près de Washington, les dirigeants israéliens, palestiniens et peut-être syriens pour tenter d’imposer la « pax americana » dont il rêve.
Il en parle généreusement, le président Bush, de cet Etat palestinien qu’il appelle désormais de ses vœux. Il en parle même presqu’au présent, puisqu’il espère contribuer à sa création avant la fin de son mandat, dans un an. La rencontre d’Annapolis inaugure cette dernière phase de l’agenda moyen oriental présidentiel dont l’Histoire ne retiendra que les choix dramatiques, les politiques belliqueuses, les stratégies aventuristes et les tentations arrogantes et guerrières. A moins qu’un semblant de solution dans l’emblématique conflit israélo-arabe ne lui sauve la mise et ne relativise injustement les drames irakiens ou afghans et la déstabilisation générale de toute une région de la Méditerranée au Pakistan.
« Cette occasion historique ne doit pas devenir un échec historique » prévenait en début de semaine à Ankara, le président israélien Shimon Peres ; le président de l’Autorité palestinienne, Mahmoud Abbas, également présent dans la capitale turque, saluait : « une occasion exceptionnelle qui doit être saisie ». L’ambition de bien faire est affirmée. Elle l’était déjà, il y a sept ans, à Camp David, quand Yasser Arafat rencontra Ehud Barak, sous la houlette de Bill Clinton, pour constater que l’avenir d’une Palestine viable ne répondait pas aux critères militaro-sécuritaires israéliens. Et, sans douter de sa ténacité, force est de reconnaître que Mahmoud Abbas n’est pas de la même trempe que son prédécesseur, dont les Palestiniens célèbrent le troisième anniversaire de la mort.
Entre Camp David et Annapolis, le Hamas aura pris le contrôle de Gaza, le Fatah aura perdu sa majorité politique au profit des islamistes, l’Autorité Palestinienne affaiblie par la déstructuration de son administration, par la corruption, par l’étranglement économique et les actions militaires israéliens, se sera maintenue presqu’artificiellement. Dans l’ombre de la mémoire d’Arafat, en attendant des jours meilleurs. Bousculé par les intégristes religieux et l’extrême droite, le gouvernement israélien est dirigé par l’homme le plus impopulaire du pays, soupçonné de tous les maux, même par la justice. L’aventure militaire au Liban en 2006 a démontré son incompétence, l’armée doute de ses politiques et les politiques doutent désormais de leurs généraux.
Les hommes qui se rencontreront pour envisager la création d’un état palestinien sont faibles, prêts, on peut le craindre, à négocier, le dos au mur, pourvu que personne ne s’en retourne bredouille.
Cela explique sans doute les nouvelles exigences qui voient le jour à la veille de la conférence. Ehud Olmert veut que tout futur Etat palestinien « reconnaisse Israël comme l’Etat des juifs ». Il ne s’agirait donc pas de la reconnaissance d’un état par un autre. Cette revendication ethnico-religieuse, qui défie les lois et le fondement des relations internationales, pose très concrètement le problème essentiel du droit au retour des réfugiés palestiniens de 1948 et 1967, pierre d’achoppement de toute négociation entre les deux parties. Un dirigeant de l’OLP, Yasser Abed Rabbo s’essayait à l’humour pour réagir: « seul un parti sioniste considère Israël comme un état juif et nous ne demandons pas à être un membre du mouvement sioniste mondial ». Les Israéliens tentent d’imposer leur règle aux Palestiniens : « mon prix sera le tien ». Le Parlement israélien vient de passer, en première lecture, une loi prévoyant que les évolutions touchant le statut de Jérusalem nécessitent 80 voix de majorité au lieu de 61. En d’autres, termes, compte tenu du poids de la droite et des religieux, aucun règlement sur la redivision de Jérusalem en deux capitales n’est politiquement acceptable par la Knesset.
Les négociations préparatoires du sommet d’Annapolis sont dans l’impasse sur bien des points. Les Palestiniens sont condamnés à négocier où, quand et comment les Américains le souhaitent. En guise d’épée de Damoclès, la Syrie pourrait leur voler la vedette en trouvant un terrain d’entente avec les Israéliens pour le plus grand bonheur de Condoleezza Rice, la secrétaire d’Etat de George W.Bush. Les Israéliens ont très envie de négocier avec Damas. On parle déjà d’une conférence d’Annapolis II.
A Annopolis I, fin novembre, Les Palestiniens voudraient négocier un début de solution au problème des réfugiés palestiniens de 1948 et de 1967, un début de solution pour Jérusalem et sa redivision éventuelle et problématique, les frontières du futur Etat palestinien, et surtout la question de l’avenir des colonies juives dans les territoires occupés. « Ils voudraient », c’est un conditionnel. Leur réalisme et leur pragmatisme semblent insupportables aux champions de la « paix anti terroriste mondiale ».
Ron Linder, Gauchebdo, Suisse, novembre 2007