samedi 14 avril 2007

Genève: Les saines colères de Salika Wenger

Salika Wenger, la présidente des Indépendants de Gauche, conseillère municipale nouvellement élue sur la liste AGT ! à Genève et notre collaborateur Ron Linder sont amis. Nous vous proposons un extrait reconstitué d’une de leurs conversations suite aux épanchements de Catherine Gaillard dans les médias genevois après la désignation de Rémy Pagani comme candidat d’AGT ! au Conseil Administratif. (Pagani et Gaillard sont issus de " solidaritéS ", aujourd’hui indubitablement la principale structure électorale d’AGT !, qui a ces dernières années " placé " ses militants à tous les postes électifs disponibles pour la gauche de la gauche dans le canton de Genève.)

- Salika ? on m’a dit que t’es plus en colère
- Quoi ?
- Que tu t’es faite éjecter du mouvement " les femmes en colère " parce que tu avais voté contre la candidature de Catherine Gaillard pour représenter A Gauche Toute ! aux élections du Conseil administratif de Genève…
- …
- T’es toujours en colère ?
- Je risque pas de me calmer si tu n’arrêtes pas de m’asticoter. Oui, j’ai préféré Pagani à Gaillard. Je te signale que les deux tiers de l’Assemblée d’AGT ! ont préféré Pagani à Gaillard. Et franchement, au vu du spectacle de cirque que Catherine nous offre dans les médias genevois, je me dis que tout est pour le mieux dans le meilleur des mondes. Je confonds pas tout : On fait de la politique et, plus compliqué encore, de la politique de gauche. Avec les résultats que l’on vient de s’offrir à Genève, on va plus faire dans la dentelle. La gauche de la gauche est en phase de reconstruction : vive la sociale ! Pagani, le combat social c’est son truc. Il est mandaté pour être à gauche, s’occuper de l’essentiel, de l’emploi, du logement, de la lutte contre la mendicité en ville… J’ai été pragmatique. Et ne me demande pas si je suis encore féministe, tu perdrais de ta crédibilité.
- T’es encore féministe ?
- C’est même pas une question qui fâche… Avec Catherine Gaillard et tant d’autres femmes de tous bords, je suis en lutte permanente contre le patriarcat, contre la société créée par et pour les hommes, contre le discours et la langue imposée par les hommes, et même si ces trente dernières années, nous avons vécu une immense révolution dont on ne calcule pas encore vraiment l’impact, on stagne encore à des années lumières de la société égalitaire à laquelle il n’est pas exagéré d’aspirer. Le rapport de domination hommes/femmes doit être aboli.
- C’est un combat spécifique aux femmes de gauche ?
T’es fâché avec la réflexion camarade ? La lutte contre la pauvreté, contre les injustices, est un combat féministe : les plus faibles, les plus fragiles dans toutes les sociétés, ce sont les femmes et leurs enfants.
- Donc tu t’es fait éjecter des " femmes en colère "… Note, elles disent que tu t’es auto éjectée.
- C’est un procès en sorcellerie. Ces dames ont décrété que je n’étais plus des leurs. Un échange de mails a suffi.
- Tu vas créer le mouvement des " femmes en rogne " pour garder le rythme…
- Je vais surtout éviter de te raconter ma vie si tu persistes à te marrer. La vérité est que nous ne parlons pas toujours du même féminisme. Mon féminisme je l’inclus dans la lutte des classes. Mon combat concret, c’est celui contre les violences domestiques, pour une assurance maternité, pour les femmes sans papiers, en faveur de l’action syndicale, contre la disparité dans le milieu du travail. Catherine, je l’ai pas vue dans ces combats. Pagani, il y a des années qu’il est sur la brèche. Pour la défense des intérimaires, des employées des petites entreprises ou des commerces. Je ne me trompe pas de priorités. Nous n’existons pas seulement dans un parlement ou un conseil municipal. Les femmes ont virtuellement acquis leurs droits politiques en Europe. Pas leurs droits sociaux ou économiques.
- Tu décris une gauche active et combative. Tu estimes donc que l’action politique de Catherine ne s’inscrit pas dans la lutte des classes ou pour plus de justice sociale ? Il n’empêche qu’elle était la tête de liste de l’AGT ! à Genève. C’est idiot, elle a été élue de solidaritéS pendant quatre ans, présidente du Conseil municipal et on découvre, parce qu’elle pète un plomb et s’étend dans les médias, sur tout le mal qu’elle pense de ses petits camarades, on découvre qu’elle n’est pas politiquement au point… On a l’air malin.
- Tu le fais exprès Linder ? Elle était tête de liste pour défendre notre programme, notre politique, pas pour faire une campagne personnelle. C’est pas la Star’Ac !
- T’énerves pas Salika…
- Ca me met en colère…
- Alors tout va bien.
- Non, on n’a pas les moyens de perdre des gens de qualité. D’ailleurs j’aimerais savoir comment Catherine Gaillard compte rester dans le groupe AGT ! Selon moi, rien ne justifie qu’elle continue à siéger. Et en plus, certains bruits laissent entendre qu’elle briguerait la présidence de la commission culturelle à la ville.
- Je suis toujours surpris de constater à quel point la gauche combative en Suisse arrondit les angles qui devraient être pointus.
- Ouais, mais bon, la camarade Gaillard, y a que l’assassinat politique virtuel qu’elle a pas encore essayé.