samedi 14 avril 2007

Genève: Rémy Pagani : je chausserais sans complexe les souliers du magistrat


Remy Pagani sera le candidat d’A Gauche Toute ! aux les élections des conseillers administratifs à Genève, le 29 avril. Il tentera, sur la liste de l’Alternative, avec deux socialistes et un vert, de préserver une majorité de gauche face aux partis de droite réunis au sein de l’Entente et une candidature UDC. Entretien.


Vous succéderiez à des conseillers administratifs de la gauche combative qui laissent des traces de leur passage et un héritage non négligeable. Que retenez-vous des mandats de Hédiger et Ferazino ?

Les deux ont été attentifs au développement et aux acquis d’une fonction publique de qualité. Contrairement au canton, la ville peut se targuer d’avoir maintenu le niveau nécessaire au service du public. Ça c’est une réalité tangible et efficace d’une politique progressiste, une gestion intelligente du capital humain.

Est-ce un pari particulier pour un syndicaliste professionnel ?

Si je suis élu, je chausserai sans complexe, les souliers du magistrat. L’expérience du terrain aidant, je serai en mesure d’harmoniser la fonction et les convictions. En matière d’emploi et de relations humaines par exemple, je défendrais des idées maîtresses de la gauche combative, la promotion des femmes, l’augmentation des postes d’apprentissage, la valorisation des capacités, une direction " collaborante ". Le système hiérarchique pyramidal devrait aussi évoluer : je préconiserais la constitution d’équipes de 20 à 30 personnes avec des délégations de pouvoir très importantes, des coordinateurs dont les mandats seraient renouvelables… La ville doit fonctionner comme une entreprise performante... au service du public.

Ce sera une élection difficile : A Gauche Toute ! a connu un échec redoutable aux municipales

Je veux marquer mon engagement. Si je perds, que ce soit au nom de mon encrage à gauche, et si je gagne, qu’il ne fasse aucun doute que je revendique ce positionnement. Cela ne m’empêcherait pas de travailler avec les conseillers élus par le peuple, mais je me positionnerais sans ambiguïté. Il faut par ailleurs assumer les mauvais résultats d’AGT ! et constater notre échec. Le nom n’est sans doute pas bon ou assez performant, nous n’avions pas non plus de magistrat pour mener la liste et nous ne devons pas nier que le corps électoral a favorisé les compromis politiques, un recentrage qui nous a été défavorable évidemment.
Pour des partis et organisations progressistes, il est difficile de faire face à l’individualisme forcené qui éloigne le citoyen de l’action militante ou sociale. Le citoyen est épuisé par l’impact de la vie professionnelle, sa vie sociale en est littéralement meurtrie… Il n’en demeure pas moins que je reste favorable à la création d’une organisation unique à la gauche du PS et des Verts ? Nous ne pourrons pas faire autrement que nous entendre. Le contraire est illusoire.
Mais notre ambition est essentielle. Comme ce fut le cas au Grand Conseil, notre absence ou notre marginalisation rendraient les Verts et le PS plus attentifs aux chants des sirènes de la droite. Dans la mesure où nous restons des partenaires crédibles, ils devront veiller à maintenir la barre à gauche autant que possible.


Vous ne manquez pas vraiment d’expérience pour briguer le poste

L’image du syndicaliste sans autre expérience ne s’applique pas à moi en effet. Au Grand Conseil, j’ai été directement intéressé aux dossiers fondamentaux en commission des travaux, législative, sociale et de l’aménagement du territoire. J’ai été aussi, pendant 10 ans, éducateur en charge d’enfants en grande difficulté, puis je me suis battu, avec un certain succès, pour la gestion d’un syndicat autogestionnaire. Je continue d’ailleurs à lutter pour un meilleur encadrement des personnes âgées et des projets immobiliers.

Vous n’êtes pas que syndicaliste d’ailleurs. Vous êtes aussi romancier

Le jour où les travailleurs auront le temps et l’énergie d’écrire un livre, la classe ouvrière sera libérée… Je ne sais plus qui a écrit ça. J’ai expérimenté l’écriture. C’est une manière de réfléchir et de…se réfléchir. Les travailleurs doivent en effet libérer le temps pour accéder aux arts. En racontant la vie des gens dans mes livres, je fais aussi de la politique. Je raconte mon univers.

(Rémy Pagani a écrit " Les Beaux jours reviendront ", " Confession d’un commissaire de police ", " Entre chien et loup ", " Etrange ballade ")

entretien, Gauchebdo, Suisse, Avril 2007