lundi 19 février 2007

France: La Gauche broute

C’est toujours la même histoire et le même débat: le fonctionnement d’un parti communiste laisse perplexe. Surtout à gauche, surtout à l’extrême gauche. En France, le PCF semble avoir respecté ce que l’on pouvait attendre de lui. Contrairement aux autres organisations structurées à la gauche du parti socialiste, il a largement contribué au développement d’un projet de rassemblement antilibéral sans ignorer que la pluralité des opinions altermondialistes, antilibérales, progressistes de toutes tendances des collectifs associatifs rendait la tâche complexe. La direction du PCF ne pouvait pas non plus douter que le seul fait de fonctionner selon des normes qui lui sont propres poserait d’une manière ou d’une autre problème à ses partenaires potentiels, aux structures diverses. En constatant qu’aucun candidat n’obtiendrait l’aval de la myriade d’organisations qui compose cette «gauche en mouvement», les communistes français ont jugé utiles de prendre des décisions et d’imposer, oui d’imposer, la candidature de Marie Georges Buffet. Ce fut l’échec. C’est donc le PCF seul qui présente sa candidate. Curieusement, on lit ou entend peu de remises en question dans les milieux alternatifs et associatiatifs. «C’est la faute au Parti. Point final».
Contestation interne
Mais si on peut s’interroger sur la légitimité des critiques ou des condamnations venant de l’extérieur du PCF, il est raisonnable de s’intéresser de près à la contestation interne au parti. D’autant qu’elle semble plus profonde que ce que le plébiscite accordé par les militants à Marie Georges Buffet laisse penser. Elle touche directement une partie du potentiel militant, actif du parti. Et Patrice Cohen-Seat, l’animateur du collectif électoral de Marie Georges Buffet ne s’y trompe quand il publie une lettre ouverte à un militant communiste pour expliquer et justifier la «décision de la direction». «Il n’y avait pas de consensus possible écrit-il en substance, notre parti a été traité par certains comme s’il n’avait pas évolué depuis les années 50 ou 60 et c’est à partir de cette vision du Parti qu’une candidature issue de nos rangs était «irrecevable».
Problème d’agenda
D’autres membres éminents du PCF ne partagent pas cette analyse. Selon eux, l’avenir du PCF se joue au niveau d’un rassemblement et nulle part ailleurs. En sachant à priori que la candidature de Buffet posait problème, la direction aurait du favoriser d’autres options. Et on en revient au point de départ. Tout le monde attend que le parti communiste prenne ses responsabilités… Et quand il les prend … Les «contestataires» de l’intérieur se sont peut-être trompés d’agenda. Le renouveau du parti qu’ils appellent de leurs vœux et pour lequel ils militent et travaillent, nécessitait-il une distanciation avec la direction au moment où précisément se joue l’avenir du PCF? Fallait-il absolument fragiliser la seule organisation populaire partie prenante dans une tentative originale de rassemblement?
Ron Linder
Gauchebdo, Suisse, janvier 2007